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CONSIDÉRATIONS

, soutenoit souvent la bonne cause, puisqu’il étoit du parti des vaincus, et cet avantage contribuoit plus à ses succès que son talent même ; l’archevêque d’Aix, l’abbé de Montesquiou, etc., spirituels défenseurs de leur ordre, cherchoient quelquefois, aussi bien que Casalès, à captiver leurs adversaires, afin d’en obtenir, non un acquiescement à leurs opinions, mais un suffrage pour leurs talents. Le reste des aristocrates n’adressoit que des injures au parti populaire, et, ne transigeant jamais avec les circonstances, ils croyoient faire le bien en aggravant le mal ; tout occupés de justifier leur réputation de prophètes, ils désiroient leur propre malheur, pour jouir de la satisfaction d’avoir prédit juste.

Les deux partis les plus exagérés de l’assemblée se plaçoient dans la salle, comme aux deux extrémités d’un amphithéâtre, et s’asseyoient de chaque côté, sur les banquettes les plus élevées. En descendant du côté droit, l’on trouvoit ce que l’on appeloit la plaine ou le marais, c’est-à-dire, les modérés, pour la plupart défenseurs de la constitution anglaise. J’ai déjà nommé les principaux d’entre eux : Malouet, Lally, Mounier ; il n’y avoit point d’hommes plus consciencieux dans l’assemblée. Mais, quoique Lally fût doué d’une superbe