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CONSIDÉRATIONS

CHAPITRE XVI.

Du gouvernement appelé le règne de la terreur.

ON ne sait comment approcher des quatorze mois qui ont suivi la proscription de la Gironde, le 31 mai 1793. Il semble qu’on descende, comme le Dante, de cercle en cercle, toujours plus bas dans les enfers. À l’acharnement contre les nobles et les prêtres on voit succéder l’irritation contre les propriétaires, puis contre les talens, puis contre la beauté même ; enfin, contre tout ce qui pouvoit rester de grand et de généreux dans la nature humaine. Les faits se confondent à cette époque, et l’on craint de ne pouvoir entrer dans une telle histoire, sans que l’imagination en conserve d’ineffaçables traces de sang. L’on est donc forcé de considérer philosophiquement des événemens sur lesquels on épuiseroit l’éloquence de l’indignation, sans jamais satisfaire le sentiment intérieur qu’ils font éprouver.

Sans doute, en ôtant tout frein au peuple, on l’a mis en mesure de commettre tous les forfaits ; mais d’où vient que ce peuple étoit ainsi