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CONSIDÉRATIONS

Bonaparte revint, la Suisse, la Hollande et le Piémont étoient encore sous l’influence françoise ; la barrière du Rhin, conquise par la république, ne lui étoit point disputée, et la force de la France étoit en équilibre avec celle des autres États de l’Europe. Pouvoit-on imaginer alors que, de toutes les combinaisons que le sort offroit à la France, celle qui devoit la conduire à être conquise et subjuguée étoit de prendre pour chef le plus habile des généraux ? La tyrannie anéantit jusqu’aux forces militaires mêmes auxquelles elle a tout sacrifié.

Ce n’étoient donc plus les revers de la France au dehors qui faisoient désirer Bonaparte en 1799 ; mais la peur que causoient les jacobins le servit puissamment. Ils n’avoient plus de moyens, et leur apparition n’étoit que celle d’un spectre qui vient remuer des cendres ; mais c’en étoit assez pour ranimer la haine qu’ils inspiraient, et la nation se précipita dans les bras de Bonaparte en fuyant un fantôme.

Le président du directoire avoit dit, le 10 août de l’année même où Bonaparte se fit consul : La royauté ne se relèvera jamais ; on ne verra plus ces hommes qui se disoient délégués du ciel pour opprimer avec plus de sécurité