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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

tifioient tour à tour les mesures les plus opposées.

Quel indigne établissement que celui de la police ! Cette inquisition politique, dans les temps modernes, a pris la place de l’inquisition religieuse. Étoit-il aimé, le chef qui avoit besoin de faire peser sur la nation un esclavage pareil ? Il se servoit des uns pour accuser les autres, et se vantoit de mettre en pratique cette vieille maxime, de diviser pour commander, qui, grâce aux progrès de la raison, n’est plus qu’une ruse bien facilement découverte. Le revenu de cette police étoit digne de son emploi. C’étoient les jeux de Paris qui l’entretenoient : elle soudoyoit le vice avec l’argent du vice qui la payoit. Elle échappoit à l’animadversion publique par le mystère dont elle s’enveloppoit ; mais, quand le hasard faisoit mettre au jour un procès où les agens de police se trouvoient mêlés de quelque manière, peut-on se représenter quelque chose de plus dégoûtant, de plus perfide et de plus bas, que les disputes qui s’élevoient entre ces misérables ? Tantôt ils déclaroient qu’ils avoient professé une opinion pour en servir secrètement une opposée ; tantôt ils se vantoient des embûches qu’ils avoient dressées aux mécontens, pour les engager à conspirer, afin de les trahir