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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

son roi : « Louis, vous pouvez vous asseoir ! » on se sent plus d’indignation que lors même qu’on le voit accuser de forfaits qu’il n’avoit jamais commis. Il faut être sorti de la poussière pour ne pas respecter de longs souvenirs, surtout quand le malheur les consacre ; et la vulgarité, jointe au crime, inspire autant de mépris que d’horreur. Aucun homme, vraiment supérieur, ne s’est fait remarquer parmi ceux qui ont entraîné la convention à condamner le roi ; le flot populaire s’élevoit et s’abaissoit à de certains mots, à de certaines phrases, sans que le talent d’un orateur aussi éloquent que Vergniaud pût influer sur les esprits. Il est vrai que la plupart des députés qui défendirent le roi dans la convention se mirent sur un détestable terrain. Ils commencèrent par déclarer qu’il étoit coupable ; l’un d’eux, entre autres, dit à la tribune que Louis XVI étoit un traitre, mais que la nation devoit lui pardonner ; et ils appeloient cela de la tactique d’assemblée ! Ils prétendoient qu’il falloit ménager l’opinion dominante, pour la modérer quand il en seroit temps. Comment, avec cette prudence cauteleuse, auroient-ils pu lutter contre leurs ennemis, qui s’élançoient de toutes leurs forces sur la victime ? En France, on capitule