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Page:De Staël – La Révolution française, Tome III.djvu/248

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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

vivant ; mais les transports du peuple anglois échappoient de toutes parts. Les acclamations de la foule retentissoient dans la salle du parlement avant qu’il y entrât : lorsqu’il parut, tous les députés se levèrent par un mouvement spontané, sans qu’aucune étiquette le leur commandât. L’émotion inspiroit à ces hommes si fiers les hommages qu’on dicte ailleurs. Rien n’étoit plus simple que l’accueil qu’on fit à lord Wellington : il n’y avoit ni gardes, ni pompe militaire, pour faire honneur au plus grand général d’un siècle où Bonaparte a vécu ; mais la voix du peuple célébroit cette journée, et rien de semblable n’a pu se voir en aucun autre pays de la terre.

Ah ! quelle enivrante jouissance que celle de la popularité ! Je sais tout ce qu’on peut dire sur l’inconstance et le caprice même des faveurs populaires ; mais ces reproches s’appliquent plutôt aux républiques anciennes, où les formes démocratiques des gouvernemens amenoient toutes les vicissitudes les plus rapides. Dans un pays gouverné comme l’Angleterre, et de plus éclairé par le flambeau sans lequel tout est ténèbres, la liberté de la presse, les choses et les hommes sont jugés avec beaucoup d’équité. La vérité est mise sous les yeux de tous, tandis que