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CORINNE OU L’ITALIE

théâtre et une société plus agréable qu’à Rome ; mais dans cette ancienne capitale de monde, je trouverai sûrement quelques Français avec qui causer, et c’est tout ce que je désire. — Vous n’avez pas été tenté d’apprendre l’italien, interrompit Oswald ? — Non, du tout, reprit le comte d’Erfeuil, cela n’entrait pas dans le plan de mes études. — Et il prit en disant cela un air si sérieux, qu’on aurait pu croire que c’était une résolution fondée sur de graves motifs.

— Si vous voulez que je vous le dise, continua le comte d’Erfeuil, je n’aime, en fait de nation, que les Anglais et les Français, il faut être fiers comme eux ou brillans comme nous, tout le reste n’est que de l’imitation. — Oswald se tut, le comte d’Erfeuil, quelques momens après recommença l’entretien par des traits d’esprit et de gaieté fort aimables. Il jouait avec les mots, avec les phrases d’une façon très-ingénieuse, mais ni les objets extérieurs ni les sentimens intimes n’étaient l’objet de ses discours. Sa conversation ne venait, pour ainsi dire, ni du dehors, ni du dedans ; elle passait entre la réflexion et l’imagination, et les seuls rapports de la société en étaient le sujet.

Il nommait vingt noms propres à lord Nelvil, soit en France, soit en Angleterre, pour