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CORINNE OU L’ITALIE

Connaissez-vous cette terre où les orangers fleurissent, que les rayons des cieux fécondent avec amour ? Avez-vous entendu les sons mélodieux qui célèbrent la douceur des nuits ? Avez-vous respiré ces parfums, luxe de l’air déjà si pur et si doux ? Répondez, étrangers, la nature est-elle chez vous belle et bienfaisante ?

Ailleurs, quand des calamités sociales affligent un pays, les peuples doivent s’y croire abandonnés par la divinité ; mais ici nous sentons toujours la protection du ciel, nous voyons qu’il s’intéresse à l’homme, et qu’il a daigné le traiter comme une noble créature.

Ce n’est pas seulement de pampres et d’épis que notre nature est parée, mais elle prodigue sous les pas de l’homme, comme à la fête d’un souverain, une abondance de fleurs et de plantes inutiles qui, destinées à plaire, ne s’abaissent point à servir.

Les plaisirs délicats soignés par la nature sont goûtés par une nation digne de les sentir ; les mets les plus simples lui suffisent ; elle ne s’enivre point aux fontaines de vin que l’abondance lui prépare : elle aime son soleil, ses beaux-arts, ses monumens, sa contrée tout à la fois antique et printanière ; les