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CORINNE OU L’ITALIE.

de roses, et quelquefois les enfans entouraient leur coupe de fleurs : car l’imagination du peuple même devient poétique sous un beau ciel. On voyait, on entendait à côté de ces rians tableaux, la mer dont les vagues se brisaient avec fureur. Ce n’était point l’orage qui l’agitait, mais les rochers, obstacle habituel qui s’opposait à ses flots, et dont sa grandeur était irritée.

E non uditc ancor come risuona
Il roco ed alto fremito marino ?

Et n’entendez-vous pas encore comme retentit le frémissement rauque et profond de la mer ? Ce mouvement sans but, cette force sans objet qui se renouvelle pendant l’éternité, sans que nous puissions connaître ni sa cause ni sa fin, nous attire sur le rivage où ce grand spectacle s’offre à nos regards ; et l’on éprouve comme un besoin mêlé de terreur de s’approcher des vagues et d’étourdir sa pensée par leur tumulte.

Vers le soir tout se calma. Corinne et lord Nelvil se promenèrent lentement et avec délices dans la campagne. Chaque pas, en pressant les fleurs, faisait sortir les parfums de leur sein. Les rossignols venaient se reposer plus volontiers sur les arbustes qui portaient les roses. Ainsi les