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d’avoir éternisé et aggravé le régime des armements, le régime de la paix armée.

Est-ce, de sa part, incompréhension ? Est-ce surtout préoccupation d’intérêt personnel ? Je crois qu’il y a de l’une et de l’autre. Ce serait un troisième chapitre à écrire après les deux dont je viens d’esquisser le cadre, que celui de l’impéritie des militaires après l’armistice. Il leur était facile, le 16 novembre 1918, de désarmer complètement l’Allemagne. A ce moment, un député, M. Margaine, l’a dit à la Chambre lors de la discussion du traité de paix, « tout leur était possible. Ils pouvaient tout exiger de l’Allemagne s’ils l’avaient voulu. Ils ne tenaient qu’à eux et aux gouvernements alliés de réaliser le désarmement ». Ils ne l’ont pas voulu.

Nous savons par leurs aveux, par les affirmations produites au cours de la discussion du traité, que le général Foch, à trois reprises, dans des mémoires des 28 novembre 1918, 10 janvier et 31 mars 1919, a adressé à M. Clemenceau des objurgations pressantes pour qu’il laissât à l’Allemagne une armée plus nombreuse que celle qu’elle devait conserver. Vous savez que le traité laissait à l’Allemagne 100.000 hommes recrutés par des engagements volontaires de 12 ans. Le général Foch, par trois fois, a essayé de démontrer à M. Clemenceau qu’il était indigne de ne laisser que 100.000 soldats à un grand peuple. Il suppliait qu’on l’autorisât à conserver 200.000 hommes fournis par le service obligatoire. En vertu du traité, l’Allemagne ne devait garder que 288 canons : 204 de 77 et 84 de 105. Dans ses mémoires, le général Foch a fait également valoir que ce chiffre était dérisoire et que 600 canons représentaient un minimum nécessaire aux Allemands.