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Page:Debussy - Monsieur Croche, 1921.djvu/147

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que vous ne l’avez imaginée. Pas une attitude, pas un geste qui ne furent d’une parfaite beauté.

» Tout ce que vous n’avez pas mis d’émotion intérieure dans ce rôle a été retrouvé par elle. Chacun de ses pas semblait contenir de la musique. Si vous aviez pu voir, au troisième acte, sa façon d’aller s’asseoir près de l’arbre sacré, avant le sacrifice, vous auriez pleuré, tellement il y avait de suprême douleur dans ce simple geste.

» Et quand, à la fin d’Iphigénie, vous unissez par les liens de l’hyménée la tendre Iphigénie au fidèle Pylade, Mme Caron a su illuminer sa figure d’un tel rayonnement, que l’on oubliait la quotidienne banalité de ce dénouement, pour ne plus admirer que la couleur violette de ses yeux, dont vous savez qu’elle est particulièrement chère à ceux qui rêvent indéfiniment de la beauté grecque.

» Avec cette femme, votre musique s’immatérialise, on ne peut plus l’étiqueter d’une époque précise, car, par un don qui fait croire à la survivance des anciens dieux, elle a cette âme tragique qui soulève le voile noir du Passé et fait revivre ces villes mortes où le culte de la Beauté s’unissait harmonieusement à celui de l’art.

» M. Cossira vous aurait plu par le charme de sa voix et M. Dufrane par la façon convaincue dont il a rugi les fureurs d’Oreste. Je n’ai pas beaucoup goûté le divertissement scythe du premier acte,