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Page:Debussy - Monsieur Croche, 1921.djvu/84

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ne vous force pas d’avance à prendre des « vessies pour des lanternes ». On peut regretter tout de même que la musique française ait suivi, pendant trop longtemps, des chemins qui l’éloignaient perfidement de cette clarté dans l’expression, ce précis et ce ramassé dans la forme, qualités particulières et significatives du génie français. — Je connais fort bien la théorie du libre-échange en art, et ce qu’elle a donné de résultats appréciables. Cela ne peut excuser d’avoir oublié à ce point la tradition inscrite dans l’œuvre de Rameau, remplie de trouvailles générales, presque uniques…

Revenons à Castor et Pollux… Le théâtre représente le lieu destiné à la sépulture des rois de Sparte. Après une ouverture, bruit nécessaire pour permettre aux robes à panier d’étaler la soie de leur tour, s’élèvent les voix gémissantes d’un chœur célébrant les funérailles de Castor. Tout de suite on se sent enveloppé d’une atmosphère tragique, qui, quand même, reste humaine, c’est-à-dire que ça ne sent pas le péplum ni le casque… Simplement des gens qui pleurent comme vous et moi. Puis arrive Télaïre, amoureuse de Castor, et la plainte la plus douce, la plus profonde qui soit sortie d’un cœur aimant est ici traduite. Pollux paraît, à la tête des combattants ; ils ont vengé l’insulte faite à Castor ; le chœur, puis un divertissement guerrier dans un mouvement superbe de force, traversé çà