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MOLL FLANDERS

condition, et, en vérité, elle eut la bonté de réduire le prix qu’il me coûtait pour vivre avec elle, jusqu’à être si bas pendant l’hiver, que je me persuadai qu’elle ne gagnait rien sur moi ; pour le logement, durant l’hiver, je ne payai rien du tout.

Quand survint la saison du printemps, elle continua de se montrer gracieuse au possible, et je logeai chez elle un certain temps, jusqu’à ce que je trouvai nécessaire d’agir différemment ; elle avait quelques personnes de marque qui logeaient fréquemment dans sa maison, et en particulier le gentilhomme qui, ainsi que je l’ai dit, avait recherché ma société l’hiver d’avant ; il revint en compagnie d’un autre gentilhomme et de deux domestiques, et logea dans la même maison ; je soupçonnai ma propriétaire de l’avoir invité, en lui faisant savoir que j’habitais toujours avec elle, mais elle le nia.

Ce gentilhomme arriva donc et continua de me remarquer et de me témoigner une confiance particulière ; c’était un véritable gentilhomme, je dois l’avouer, et sa société m’était aussi agréable que la mienne, je crois, pouvait l’être pour lui ; il ne me fit d’autres professions que d’extraordinaire respect, et il avait une telle opinion de ma vertu, qu’ainsi qu’il le déclarait souvent, il pensait que s’il proposait rien d’autre, je le repousserais avec mépris ; il eut bientôt appris par moi que j’étais veuve, que j’étais arrivée de Virginie à Bristol par les derniers navires, et que j’attendais à Bath la venue de la prochaine flottille de Virginie qui devait m’apporter des biens considérables ; j’appris par lui qu’il avait une femme, mais que la dame avait la tête troublée, et qu’elle avait été placée sous le gouvernement de ses