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MOLL FLANDERS

était frappé très profondément ; et son air était lugubre tandis qu’il parlait.

— Voilà qui change le cas, en vérité, monsieur, dis-je, pour la partie dont vous parliez ; mais un cocu, vous le savez, peut être un honnête homme, et ici le cas n’est point changé du tout ; d’ailleurs, il me paraît, dis-je, puisque votre femme est si déshonnête, que vous avez bien trop d’honnêteté de la garder pour femme ; mais voilà une chose, dis-je, où je n’ai point à me mêler.

— Oui, certes, dit-il, je songe bien à l’ôter de dessus mes mains ; car pour vous parler net, madame, ajouta-t-il, je ne suis point cocu et content ; je vous jure que j’en suis irrité au plus haut point ; mais je n’y puis rien faire ; celle qui veut être p… sera p…

Je changeai de discours, et commençai de parler de mon affaire, mais je trouvai qu’il ne voulait pas en rester là ; de sorte que je le laissai parler ; et il continua à me raconter tous les détails de son cas, trop longuement pour les rapporter ici ; en particulier, qu’ayant été hors d’Angleterre quelque temps avant de prendre la situation qu’il occupait maintenant, elle, cependant, avait eu deux enfants d’un officier de l’armée, et que lorsqu’il était rentré en Angleterre, l’ayant reprise sur sa soumission et très bien entretenue, elle s’était enfuie de chez lui avec l’apprenti d’un marchand de toiles, après lui avoir volé tout ce qu’elle avait pu trouver, et qu’elle continuait à vivre hors de la maison : « de sorte que, madame, dit-il, elle n’est pas p… par nécessité, ce qui est le commun appât, mais par inclination, et pour l’amour du vice ».

Eh bien, je m’apitoyai sur lui, et lui souhaitai d’être débarrassé d’elle tout de bon, et voulus en revenir à mon