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MOLL FLANDERS

grossièrement au commissaire. Toutefois le commissaire ne changea point d’humeur et ne se laissa pas irriter ; et alors je m’entremis et je dis :

— Allez, monsieur le commissaire, laissez-lui la paix ; je trouverai des moyens assez pour l’amener devant un magistrat, n’ayez crainte ; mais voilà cet individu, dis-je : c’est l’homme qui m’a saisie au moment que je passais innocemment dans la rue, et vous êtes témoin de sa violence à mon endroit depuis ; permettez-moi je vous prie, de vous le mander afin que vous l’emmeniez devant un juge.

— Oui, madame, dit le commissaire.

Et se tournant vers l’homme :

— Allons, mon jeune monsieur, dit-il au compagnon, il faut venir avec nous ; j’espère que vous n’êtes pas, comme votre maître, au-dessus du pouvoir du commissaire.

Cet homme prit un air de voleur condamné, et se recula, puis regarda son maître, comme s’il eût pu l’aider ; et l’autre comme un sot l’encouragea à l’insolence ; et lui, en vérité, résista au commissaire, et le repoussa de toutes ses forces au moment qu’il allait pour le saisir ; d’où le commissaire le renversa par terre sur le coup, et appela à l’aide : immédiatement la boutique fut pleine de gens et le commissaire saisit maître, compagnon et tous les valets.

La première mauvaise conséquence de ce tumulte fut que la femme qui était vraiment la voleuse se sauva et se perdit dans la foule, ainsi que deux autres qu’ils avaient arrêtés aussi : ceux-là étaient-ils vraiment coupables ou non, je n’en puis rien dire.