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MOLL FLANDERS

moi ; mais elle ne pouvait m’aider ; et pour ajouter à toute cette terreur, on ne faisait que dire par toute la prison que ma mort était assurée ; je les entendais fort bien en parler souvent entre elles, et je les voyais hocher la tête et dire qu’elles en étaient bien fâchées, et autres choses semblables, comme il est d’usage en ce lieu ; mais pourtant aucune n’était venue me dire ses pensées jusqu’enfin un des gardiens vint à moi privément et dit avec un soupir :

— Eh bien, madame Flanders, vous allez être jugée vendredi (et nous étions au mercredi) ; qu’avez vous l’intention de faire ?

Je devins blanche comme un linge et dis :

— Dieu sait ce que je ferai ; pour ma part, je ne sais que faire.

— Hé quoi, dit-il, je ne veux point vous flatter ; il faudrait vous préparer à la mort, car je doute que vous serez condamnée, et comme vous êtes vieille délinquante, m’est avis que vous trouverez bien peu de merci. On dit, ajouta-t-il, que votre cas est très clair, et que les témoins vous chargent de façon si positive, qu’il n’y a point à y résister.

C’était un coup à percer les entrailles mêmes d’une qui, comme moi, était pliée sous un tel fardeau, et je ne pus prononcer une parole, bonne ou mauvaise pendant longtemps ; enfin j’éclatai en sanglots et je lui dis :

— Oh ! monsieur, que faut-il faire ?

— Ce qu’il faut faire ? dit-il. Il faut faire chercher un ministre, pour lui parler ; car en vérité, madame Flanders, à moins que vous n’ayez de bien puissants amis,