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MOLL FLANDERS

rive orientale de la rivière de Potomac, qu’on nomme rivière de Rappahanoc, et par ce moyen j’arrivai sur l’arrière de sa plantation, qui était très vaste, et à l’aide d’une crique navigable de la rivière de Rappahanoc, je pus venir tout près.

J’étais maintenant pleinement résolue à aller franchement et tout droit à mon frère (mari) et à lui dire qui j’étais ; mais ne sachant l’humeur où je le trouverais, ou plutôt s’il ne serait point hors d’humeur d’une visite si inattendue, je résolus de lui écrire d’abord une lettre afin de lui faire savoir qui j’étais, et que je n’étais point venue lui donner de l’inquiétude sur nos anciens rapports que j’espérais qui étaient entièrement oubliés, mais que je m’adressais à lui comme une sœur à son frère, lui demandant assistance dans le cas de cette provision que notre mère, à son décès, avait laissée pour me supporter, et où je n’avais point de doute qu’il me ferait justice, surtout regardant que j’étais venue si loin pour m’en informer.

Je lui disais dans ma lettre des choses fort tendres au sujet de son fils, qu’il savait bien, lui disais-je, qui était mon enfant, et qu’ainsi que je n’avais été coupable de rien en me mariant à lui, non plus que lui en m’épousant, puisque nous ne savions point du tout que nous fussions parents ; ainsi j’espérais qu’il céderait à mon désir le plus passionné de voir une seule fois mon cher et unique enfant et de montrer quelque peu des infirmités d’une mère, à cause que je préservais une si violente affection pour ce fils qui ne pouvait avoir gardé de souvenir de moi en aucune façon.

Je pensais bien qu’en recevant cette lettre, il la donnerait immédiatement à lire à son fils, ses yeux étant,