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MOLL FLANDERS

dis que ne sachant point ce qui pourrait nous arriver dans le voyage, et regardant à quoi notre condition pourrait nous exposer, je n’avais pas emporté tout mon fonds et que j’en avais laissé aux mains de mon amie cette partie que, maintenant que nous avions passé la mer et que nous avions heureusement établis, j’avais fait venir afin qu’il la vît.

Il fut stupéfait et demeura un instant à compter sur ses doigts, mais ne dit rien ; à la fin, il commença ainsi :

— Attends, voyons, dit-il, comptant encore sur ses doigts, et d’abord sur le pouce, — il y a d’abord 246 £ en argent, ensuite deux montres en or, des bagues à diamant et de la vaisselle plate, dit-il, — sur l’index : puis sur le doigt suivant — nous avons une plantation sur la rivière d’York à 100 £ par an, ensuite 150 £ d’argent, ensuite une chaloupe chargée de chevaux, vaches, cochons et provisions — et ainsi de suite jusqu’à recommencer sur le pouce — et maintenant, dit-il, une cargaison qui a coûté 250 £ en Angleterre, et qui vaut le double ici.

— Eh bien, dis-je ; que fais-tu de tout cela ?

— Ce que j’en fais ? dit-il. Mais qui donc prétend que je me suis fait duper quand j’ai épousé ma femme dans le Lancashire ? Je crois que j’ai épousé une fortune, dit-il, et, ma foi, une très belle fortune.

En somme, nous étions maintenant dans une condition fort considérable, et qui s’augmentait chaque année ; car notre nouvelle plantation croissait admirablement entre nos mains, et dans les huit années que nous y vécûmes, nous l’amenâmes à un point tel que le revenu en était d’au moins 300 £ par an, je veux dire valait cette somme en Angleterre.