Page:Defoe - Robinson Crusoé, Borel et Varenne, 1836, tome 2.djvu/210

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vres à la Martinique, il avait cru tenir une bonne occasion d’accomplir son premier dessein ; mais, arrivé à Québec, le capitaine était mort, et le vaisseau n’avait pas poussé plus loin. Il s’était donc résigné à retourner en France sur le navire qui avait brûlé en mer, et dont nous avions recueilli l’équipage, et finalement il s’était embarqué avec nous pour les Indes-Orientales, comme je l’ai déjà dit. — C’est ainsi qu’il avait été désappointé dans cinq voyages, qui touts, pour ainsi dire, n’en étaient qu’un seul : cela soit dit sans préjudice de ce que j’aurai occasion de raconter de lui par la suite.

Mais je ne ferai point de digression sur les aventures d’autrui étrangères à ma propre histoire. — Je retourne à ce qui concerne nos affaires de l’île. Notre religieux, — car il passa avec nous tout le temps que nous séjournâmes à terre, — vint me trouver un matin, comme je me disposais à aller visiter la colonie des Anglais, dans la partie la plus éloignée de l’île ; il vint à moi, dis-je, et me déclara d’un air fort grave qu’il aurait désiré depuis deux ou trois jours trouver le moment opportun de me faire une ouverture qui, espérait-il, ne me serait point désagréable, parce qu’elle lui semblait tendre sous certains rapports à mon dessein général, le bonheur de ma nouvelle colonie, et pouvoir sans doute la placer, au moins plus avant qu’elle ne l’était selon lui, dans la voie des bénédictions de Dieu.

Je restai un peu surpris à ces dernières paroles ; et l’interrompant assez brusquement : — « Comment, sir, m’écriai-je, peut-on dire que nous ne sommes pas dans la voie des bénédictions de Dieu, après l’assistance si palpable et les délivrances si merveilleuses que nous avons vues ici, et dont je vous ai donné un long détail ? »

— S’il vous avait plu de m’écouter, sir, répliqua-t-il