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UNE DIRECTION ! LE POSITIVISME 21

celle qu'il regardait comme le type de la perfection humaine, il désira être bon, et nous savons qu'il y parvint. Il se réconcilia avec Arago, qu'il haïssait, avec sa famille de Montpellier, qu'il n'aimait guère ; il inspira une telle affection à Sophie Bliaux et à son mari que, dans un moment de gêne, ces deux domes- tiques vinrent d'eux-mêmes lui offrir ce qu'ils pos- sédaient. Il fut chaste, il fut sobre et finit par se refuser les moindres plaisirs de la table; il supprima son dessert pour se mortifier, et, tous les soirs, il termina son repas par un morceau de pain sec, afin de penser aux malheureux qui meurent de faim ; il vivait le matin d'un peu de lait, le soir d'un peu de viande et de légumes. Toute sa personne physique reflétait alors l'état de son âme ; un Anglais, qui en avait autrefois reçu des leçons et qui le revit en 1 85 1 , fut frappé du changement qui s'était opéré dans sa physionomie, a II me rappelait, dit-il, une « de ces peintures du moyen âge qui représentent « saint François uni à la Pauvreté. Il y avait dans « ses traits une tendresse qu'on aurait pu appeler « idéale plutôt qu'humaine. A travers ses yeux à « demi fermés éclatait une telle bonté d'âme, qu'on « était tenté de se demander si elle ne surpassait « pas encore son intelligence... Il était mystique (?) « et ascète, il vivait dans là mortification, il avait des « visions et presque des extases (1) ; il s'était fait « une âme de saint. »

Il n'est parvenu à cet état de perfection supra- humaine qu'au prix d'une patiente application. Mais

(1) Oui, mais qu'il provoquait lui-même, systématique- ment.