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lia !... — Don Camille !... — Vous m’outragez, princesse. — Vous m’abandonnez bien, prince. — Ah ! Cornélia, s’écria Camille les larmes aux yeux, Cornélia, au nom du ciel, n’accomplissez pas votre dessein ; vous allez nous perdre sans ressource... Réfléchissez donc à la démarche que vous prétendez faire ; pensez donc aux conséquences de la colère de dona Olimpia !... elle est toute-puissante à Rome ; un mot de sa bouche et nous sommes perdus... » La princesse de Rossano interrompit Camille par un éclat de rire moqueur. « Vraiment, dit-elle, à en juger par la terreur que vous inspire madame votre mère, je sens que je ne pourrai jamais rien obtenir de vous tant que je ne me montrerai pas aussi impérieuse qu’elle. Aussi, mon cher Camille, commencé-je dès aujourd’hui à prendre ce nouveau rôle auprès de vous, et je vous signifie positivement que, quoiqu’il arrive, je pars demain pour Rome. » En disant ces mots elle sonna vivement, et ordonna au serviteur qui se présenta de dire à son écuyer de tenir la grande voiture de gala prête, et attelée des quatre chevaux blancs, pour le lendemain à deux heures après midi.

Dom Camille resta d’abord étourdi de ce qu’il venait d’entendre ; mais rassuré intérieurement par la douceur de caractère que la princesse avait toujours montrée jusque-là, il se persuada que ce n’était qu’un jeu mis en usage par elle, et dont les conséquences ne seraient rien moins que sérieuses. Il prit même la chose en badinant, et engagea sa femme à se coucher pour prendre du repos et se préparer à son grand voyage. Ils se séparèrent après s’être embrassés, et bientôt le sommeil suspendit pour eux le souvenir des premiers débats qu’ils eussent eus ensemble.

Mais dans la matinée suivante, ils se représentèrent vivement à l’esprit de dom Camille, lorsqu’il vit tous les gens d’écurie rouler le grand carrosse dans la cour, le nettoyer, ainsi que les harnois des chevaux, et faire effectivement les préparatifs du voyage dont Cornélia l’avait menacé.

Camille redoutait tellement toutes les circonstances décisives, et qui pouvaient rendre indispensable une explication, qu’il laissa les gens de sa femme achever les préparatifs