elles énervent l’âme en exerçant habituellement ses facultés sur la peinture de maux et d’infortunes présentés tout à la fois comme séduisants et incurables ; enfin elles nous conduisent à la mélancolie sans objet, à l’abattement, puis au désespoir.
Aux tristes combinaisons romanesques de la fin du dernier siècle, on n’a ajouté depuis Werther qu’un ingrédient qui les rend plus pernicieuses encore : c’est le mysticisme, le néo-christianisme, ou autres balivernes pédantesques de ce genre.
Oh ! alors, vive Boccace ! vive l’Arioste ! Fielding ! le Sage ! et Molière ! car c’est dans leurs compositions seulement que vous trouverez le contre-poison dont vous ne pouvez plus vous passer.
En suivant l’enchaînement des idées qui se sont présentées à mon esprit sur les effets de la lecture des romans, j’en ai sans doute émis plus d’une qui serviront de condamnation aux ouvrages de ce genre, que j’offre dans ce volume. Mais je crains bien moins de compromettre mon jugement que ma bonne foi. Je me soumets donc d’avance à tous les arrêts portés par moi-même, qui serviront peut-être de condamnation à mes écrits, et je me résume en recommandant de lire le moins de romans qu’il sera possible, sans excepter même les miens de la proscription.
Maintenant que ceux qui n’entreprennent rien sans l’avis de leur directeur, le consultent avant de tourner la page ; quant aux gens du monde, je voudrais être aussi certain de les amuser que je le suis de ne pouvoir leur nuire.
Fontenay-aux-Roses, juillet 1843.