de prétendre au trône. En confondant nos intérêts, en réunissant les efforts de tous ceux qui peuvent nous servir, nous quadruplerons leur influence pendant le conclave, en nous préparant des défenseurs zélés pour le cas où le pontife élu chercherait à nous devenir contraire. Unissons-nous, serrons nos familles et nos amis, Antoine, pour résister au choc de ceux qui veulent notre perte, car on l’a jurée. »
Malgré l’expérience et l’habileté d’Antoine Barberin dans les affaires, cet homme avait été si longtemps gâté par la fortune, et un fond de légèreté naturelle à son caractère le rendait si facilement dupe de ses illusions, qu’il reçut avec quelque étonnement l’avertissement d’un danger qu’il avait bien prévu, mais qu’il ne supposait ni aussi prochain ni aussi menaçant. Ce qu’il venait d’entendre lui apprenait que la restitution du dernier tiers de ses biens par Innocent X dépendait de la volonté de dona Olimpia, qui n’y souscrirait que s’il s’engageait à faire avec elle le pacte qu’elle lui proposait. Quelles pouvaient en être les conditions ? C’est ce qu’il importait de savoir ; et pour l’apprendre le cardinal usa de toute sa prudence. « Je reconnais, dit-il, toute la justesse de vos prévisions, madame, et suis disposé à joindre, comme vous le désirez, mes efforts aux vôtres pour éviter ou combattre au besoin le danger commun qui nous menace ; ma conduite, depuis que j’ai regagné les bonnes grâces du pontife par votre généreuse entremise, doit vous donner d’avance la persuasion que je n’agirai que selon vos intérêts ; et s’il était nécessaire de donner plus de consistance à la certitude que vous désirez en avoir, je vous en ferais la promesse solennelle ici ; je vous la fais même. — Je n’attendais pas moins de vous, mon cher Antoine, et quant à ce qui me regarde personnellement, votre parole me suffit... mais... » À cette réticence, Barberin ne put se défendre de montrer de l’étonnement et quelque peu de fierté. « Ne vous fâchez pas, reprit dona Olimpia en faisant paraître un sourire gracieux sur ses lèvres ; il ne s’agit précisément ici ni de vous ni de moi. Je considère les choses de plus haut. Ni vous ni moi ne sommes jeunes, et comme tous, nous sommes sujets à la mort. Représentants, vous de la famille Barberine, moi de celle des