lini, après avoir fait passer le cortège, était resté le dernier ; il ne vit pas sans inquiétude ce changement subit dans les dispositions de la plèbe. Resté en dehors, il fit fermer la porte du palais, et après avoir donné ses ordres aux officiers corses, il en dirigea l’exécution jusqu’au moment où la garde, ayant formé, non sans peine, un vaste demi-cercle en saillie sur la place, eût refoulé le peuple loin du palais. Du haut de sa mule, le jeune prélat promenait fièrement son regard sur les groupes de la foule dont l’attitude semblait le plus menaçante, et il ne quitta son poste que lorsqu’il crut être certain qu’il avait inspiré assez de crainte pour ôter l’idée aux plus audacieux de faire des tentatives de désordre qui seraient sévèrement réprimées. Avant d’entrer dans le palais, il lança un dernier regard sur cette foule, qui eut peur de lui, parce qu’il n’avait pas eu peur d’elle.
Mais dans l’intérieur du palais, l’agitation, pour être d’une autre nature, n’en était pas moins grande que sur la place Navone. Dès qu’Azzolini fut entré, sous le péristyle, partout, sur les escaliers, dans les antichambres, il trouva des groupes formés par les gens de la maison, parlant tous à la fois et d’un ton très-animé. « Je vous dis, répétait l’un, que celui qui a fait le coup connaît la maison mieux que vous et moi. — Comment pourrait-il en être autrement ? reprenait l’autre ; va-t-on dans un cabinet fermé ouvrir un meuble dont son excellence a la clef, sans avoir eu la confiance entière de la princesse ? — Ce n’est pas de ma faute si ce malheur est arrivé, ajoutait le majordome, d’un ton de voix plus bas, mais qui exprimait le dépit. Que de fois j’ai dit à la princesse qu’elle changeait trop souvent de domestique ! L’intérieur du palais Pamphile est connu par plus de gens que les détours du Colisée ; voilà ce qui résulte toujours d’une économie mal entendue, ajoutait-il à ceux qui ne saisissaient pas le sens de son observation. Quand on ne paye pas bien ses domestiques, quand on lésine sur leurs gages, et qu’au lieu de les récompenser on les met à la porte, on en fait des voleurs ; et tout cela pour épargner quelques centaines d’écus au bout de l’année ! Voyez le beau calcul ! »
Azzolini ne put douter qu’il s’agissait d’un vol commis