princesse de Rossano, qui, ainsi que le prince son mari, n’avait pas voulu quitter Rome pendant le danger, reçut les aveux d’un homme du peuple, qui vint lui découvrir le projet et les noms de ses complices, en se mettant sous sa protection et demandant sa grâce. La princesse fit aussitôt prévenir le pape et la reine du danger qu’ils couraient, et malgré tout ce que le fléau qui régnait dans la ville pouvait présenter d’effrayant, elle et son mari rassemblèrent le peu de troupes qu’ils purent trouver, et allèrent saisir les conjurés ainsi que les armes qu’ils avaient mises en dépôt, près de Saint-Sylvestre du Quirinal, et à Saint-Charles des Quatre-Fontaines. Le pape eut peur et voulut s’enfermer avec les cardinaux dans son palais. Mais dom Camille et sa femme, qui par leur fermeté s’étaient rendus maîtres des principaux conjurés et de leurs armes, arrivèrent au Vatican au moment que le pontife méditait cet acte de faiblesse. Dom Camille s’efforça de lui faire changer de résolution en l’assurant que cette conduite timide ranimerait l’audace des malfaiteurs. Depuis longtemps déjà il s’épuisait en raisonnements auprès du pape, lorsque la princesse de Rossano se tournant vers Sforza, Azzolini, Aldobrandini, Maldachini, et quelques autres cardinaux qu’elle connaissait pour des hommes résolus : « Allons, allons, éminences, leur dit-elle, le temps presse, ne le perdons pas en paroles. Que ceux de messieurs les cardinaux qui n’ont peur ni de la peste ni des conjurés veuillent bien se montrer dans la ville, et leur présence fera rentrer tout dans l’ordre. » Cette allocution faite par la princesse dont on connaissait déjà la conduite courageuse, entraîna presque tous les cardinaux. Dom Camille descendit pour disposer les troupes qui l’attendaient à la porte du palais, et lorsque le pontife vit que presque tout le sacré collège se mettait en marche, il se décida à ne point l’abandonner. Escorté d’une faible troupe que dirigeaient dom Camille et la princesse, le pape entouré des cardinaux, après avoir traversé une partie de la ville à pied, entra dans Sainte-Marie-Majeure, où il fit une prière, puis parcourut de la même manière d’autres quartiers de Rome au retour, recommandant le courage aux malades, donnant sa bénédiction au peuple, et rendant aux
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