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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

Nous avons rencontré un autre second du pacha de la province.

Il fait un vent très froid, le ciel pur. — Nous sommes dans la province d’El-Garb, divisée en deux gouvernements.

— Des enfants nous ont jeté des pierres. On a envoyé arrêter le village. Ils n’en seront peut-être pas quittes pour cinquante piastres. Probablement les deux vaches données le soir à Mornay venaient de là.

Dimanche 11 mars. — A la rivière Sébou, au passage de El-Aïtem[1].

Depuis trois jours nous sommes suivis par un shérif de Fez, ami de Bias, qui veut absolument avoir un cadeau.

Quand les Maures veulent obtenir quelque chose, comme une grâce, de manière à n’être pas refusés, ils vont porter près de votre tente un mouton, même un bœuf comme présent, et l’égorgent en manière de sacrifice, et pour constater l’offrande. On est lié très fort par l’espèce d’obligation que cette action impose.

Le jour que nous avons campé à Alcassar, on est

  1. Le paysage de la rivière Sébou inspira une toile exposée au Salon de 1859, ainsi décrite dans le catalogue Robaut : « Six Marocains se baignent à l’un des tournants du fleuve peu profond. Au premier plan à gauche débouche un cavalier qui va faire rafraîchir son cheval. Tout auprès un baigneur étendu se repose. Sur l’autre rive, un cheval conduit par la bride a déjà le pied dans l’eau. »