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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

que… Quel charmant génie ! M. Clésinger, sculpteur, était présent ; il me cause une impression peu favorable. Après son départ, d’Arpentigny m’a commencé son apologie dans le sens de mon impression.

13 mars. — Lacroix Gaspard[1] venu un instant. Il m’a beaucoup loué du dessin de mon Christ de la rue Saint-Louis. C’est la première fois qu’on m’en fait compliment.

Hier, Clésinger m’a parlé d’une statue de lui qu’il ne doutait pas que je n’aimasse beaucoup, à cause de la couleur qu’il y a mise. La couleur étant, à ce qu’il paraît, mon lot exclusif, il faut que j’en trouve dans la sculpture, pour qu’elle me plaise, ou seulement pour que je la comprenne… !

— Repris le Valentin.

— Mme de Forget est venue me chercher pour dîner, et à neuf heures j’ai été chez M. Moreau ; Couture y était.

    brillant et si curieux comme style qu’il consacra à la mémoire du célèbre artiste, après avoir décrit l’assemblée composée de H. Heine, Meyerbeer, Ad. Nourrit, Hiller, Nimceviez, G. Sand, Liszt s’exprime ainsi sur Delacroix : « Eugène Delacroix restait silencieux et absorbé devant les apparitions qui remplissaient l’air, et dont nous croyions entendre les frôlements. Se demandait-il quelle palette, quels pinceaux, quelle toile il aurait à prendre pour leur donner la vie de son art ? Se demandait-il si c’est une toile filée par Arachné, un pinceau fait des cils d’une fée, et une palette couverte des vapeurs de l’arc-en-ciel qu’il lui faudrait découvrir ? » La mort prématurée de Chopin causa à Delacroix une tristesse profonde, dont on trouve la trace dans sa Correspondance et dans son Journal.

  1. Gaspard-Jean Lacroix, peintre de paysage, élève de Corot, né à Turin en 1810.