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Page:Delacroix - Journal, t. 2, éd. Flat et Piot, 2e éd.djvu/147

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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

à cette humeur naturelle celle que la maladie ou les chagrins vous donnent dans une plus grande proportion, l’aversion qu’inspire une personne à qui notre sort est lié peut devenir un véritable supplice. Les crimes auxquels on voit se porter une foule de malheureux en l’état de société, sont plus affreux que ceux que commettent les sauvages. Un Hottentot, un Iroquois fend la tête à celui qu’il veut dépouiller ; chez les anthropophages, c’est pour le manger qu’ils l’égorgent, comme nos bouchers font d’un mouton ou d’un porc. Mais ces trames perfides longtemps méditées, qui se cachent sous toutes sortes de voiles, d’amitié, de tendresse, de petits soins, ne se voient que chez les hommes civilisés.

— Aujourd’hui, à la séance de la mairie du IVe arrondissement, pour le choix des jurés.

Déjà fort indisposé, je suis rentré après avoir été un instant à l’Hôtel de ville, et ai fait tout le chemin à pied ; mais c’est une vaillantise qui ne m’a point réussi. Peut-être eussé-je été plus malade sans cela. Mais à partir de ce jour a commencé l’indisposition qui m’a fort retenu et fort donné à penser sur la sottise de vouloir se crever de travail et compromettre tout par le sot amour-propre d’arriver à temps.

Vendredi 19 novembre. — Je vois que les élégants font à Pétersbourg des cigarettes de thé vert. Elles n’ont pas du moins l’inconvénient d’être narcotiques.