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Page:Delacroix - Journal, t. 2, éd. Flat et Piot, 2e éd.djvu/197

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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

rien et de la négliger… » Et plus bas : « Quand il serait vrai, ce que plusieurs disent, que l’éducation ne donne pas à l’homme un autre cœur ni une autre complexion, qu’elle ne change rien dans son fond et ne touche qu’aux superficies, je ne me lasserais pas de dire qu’elle ne lui est pas inutile. »

Je suis tout à fait de son avis, et j’ajoute que l’éducation dure toute la vie[1] ; je la définis : une culture de notre âme et de notre esprit par l’effet de soins et par celui des circonstances extérieures. La fréquentation des honnêtes gens ou des méchants est la bonne ou mauvaise éducation de toute la vie. L’esprit se redresse avec les esprits droits ; il en est de même de l’âme. On s’endurcit dans la société des gens durs et froids, et s’il était possible qu’un homme de vertu seulement ordinaire vécût avec des scélérats, il faudrait qu’il finît par leur ressembler, pour peu qu’il n’en soit pas éloigné dès le premier moment.

Essayé pendant toute cette journée de débrouiller mon article du Poussin. Je me persuade qu’il n’y a qu’un moyen d’en venir à bout, si toutefois j’y parviens : c’est de ne point penser à la peinture, jusqu’à ce qu’il soit fait. Ce diable de métier[2] exige une

  1. Cette conviction du maître se réfère exactement à celle que nous indiquions dans notre Étude et qu’il formulait ainsi lui-même : « La connaissance du devoir ne s’acquiert que très lentement, et ce n’est que par la douleur, le châtiment et par l’exercice progressif de la raison que l’homme diminue peu à peu sa méchanceté naturelle. » (Voir t. I, p. ix, x.)
  2. A propos de cette difficulté d’écrire, qu’il constate à certains