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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

du mien ; elle a l’envie de plaire. Elle serait gracieuse avec un bouvier, et elle ne se force point pour se livrer à ce penchant. Ce qui en reste de véritablement bon ou obligeant, le ciel le sait mieux que moi ou quelle-même peut-être… Je suis ainsi ; on est comme on peut.

Berryer, l’autre fois que nous nous promenions (c’était le lundi) en attendant ces dames, assis au bout de l’allée de tilleuls où il a fait un promenoir, me disait qu’il conseillait de la douceur à Villemain dans le jugement qu’il porte sur les hommes et sur leurs passions, dans ce qu’il écrit sur les hommes de notre temps : le point de vue est en raison des passions et des préjugés du moment. Martignac, le plus doux des hommes, voulait, après 1815, faire pendre lui et son père, après le fameux procès qu’ils avaient plaidé tous les deux pour les proscrits[1].

C’est ce même jour, c’est-à-dire le lundi, qu’au lieu de faire une promenade avec ces messieurs, je me suis trouvé vers trois heures avec lui seulement, que nous avons été en bateau et que, m’ayant laissé pour aller s’habiller, je suis revenu rattacher le bateau et l’ai trouvé tout vêtu, attendant ses hôtes (je me trompe encore, je crois que c’est le dimanche, quand il attendait l’évêque).

Ce jour, mardi, excellente musique[2] le soir, de

  1. Les procès du Maréchal Ney.
  2. Mme Jaubert décrit ainsi le salon de Berryer à Augerville : « Accoudé sur une table basse, notre grand peintre caressait de sa main pâle et