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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

Dans la journée, à la commission de l’Industrie. On nous avait dérangés pour nous demander quels étaient ceux qui voulaient aller à Londres à l’ouverture du Palais de Cristal. On n’a pu, en présence de ce brave lord Cowley[1], malgré ses invitations pressantes, trouver que deux membres de bonne volonté. Chacun de nous, soumis à un interrogatoire, a décliné la commission. Ces Anglais ont refait là une de leurs merveilles qu’ils accomplissent avec une facilité qui nous étonne, grâce à l’argent qu’ils trouvent à point nommé et à ce sang-froid commercial, dans lequel nous croyons les imiter. Ils triomphent de notre infériorité, laquelle ne cessera que quand nous changerons de caractère. Notre Exposition, notre local sont pitoyables ; mais, encore un coup, nos esprits ne seront jamais portés à ces sortes de choses, où des Américains dépassent déjà des Anglais eux-mêmes, doués qu’ils sont de la même tranquillité et de la même verve dans la pratique[2].

8 juin. — Reçu ce matin, presque en même temps, la nouvelle de la mort de Pierret et de celle de Rais-

    une noble et grande période artistique, digne d’un profond respect, est tout entière et visiblement descendue au tombeau : elle et lui n’appartiennent plus à la vie, mais… uniquement à l’histoire de l’Art. Inclinons-nous profondément et respectueusement devant le cercueil du créateur de la Vestale, de Fernand Cortez et d’Olympie. »

  1. Lord Cowley, diplomate anglais, né en 1804. En 1852, il était ambassadeur d’Angleterre à Paris. Il contribua à établir sur des bases durables l’alliance de l’Angleterre avec la France.
  2. Le succès de l’Exposition universelle de 1889 aurait sans doute modifié la manière de voir de Delacroix sur ce point.