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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

par un temps sec, le placer dans des paniers sans le froisser, le transporter dans une chambre au midi, et on le range avec précaution en isolant les grappes sur une légère couche de paille ; une fois placé, il ne faut pas le toucher pour le servir. Les fenêtres garnies de persiennes et non de volets ; toujours tenir fermé pour demi-lumière ; ne pas ouvrir les fenêtres.

21 octobre. — Les rôles de Racine sont presque tous parfaits. Il a pensé à tout, n’a point fait de remplissages : Burrhus, premier rôle s’il en fut ; Narcisse de même ; Britannicus, le naïf, l’ardent, l’imprudent Britannicus ; Junie, si aimante, mais délicate, prudente au milieu de toute sa tendresse, mais prudente seulement pour son amant. Je passe sous silence Néron et Agrippine, parce que, au théâtre, avec deux rôles comme ceux-là, avec un seul quand il est rempli par un acteur passable, on sort content ; on croit qu’on a vu une pièce de Racine, même quand on a laissé passer sans les remarquer, à travers le débit des mauvais auteurs, toutes ces nuances, qui sont cependant tout Racine.

Il y a des pièces où le personnage principal, celui qui est le pivot de la pièce, est sacrifié et donné toujours à des subalternes. Est-il un personnage comparable à celui d’Agamemnon ? L’ambition, la tendresse, ses attitudes devant sa femme, enfin ses agitations perpétuelles, qu’on ne peut imputer pourtant à une faiblesse de sentiment, qui lui ôterait