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Page:Delacroix - Journal, t. 3, éd. Flat et Piot, 3e éd.djvu/112

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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

d’aimer, nous aimons ce que nous rencontrons et qui est imparfait, faute de mieux ? La conclusion de ceci serait que notre passion serait d’autant plus vive que notre maîtresse ressemblerait davantage à la Niobé ou à la Vénus, mais on en rencontre qui sont ainsi faites et qui ne nous forcent nullement à les aimer.

2 octobre. — Je pars de Strasbourg à midi et demi. Séparation tendre, regrets et adieux.

Je voyage avec une jeune mère très attentive à son enfant et qui ne l’a pas laissé une minute : petite femme frêle, blond fade, l’air intelligent ; mais cette tendresse était vraiment touchante.

Je traverse l’Alsace, la Lorraine, la Champagne. Rien ne me parle dans tout cela.

Désappointement, en arrivant, de trouver une malle étrangère au lieu de la mienne ; cela renverse toute la joie que je me promettais ; j’arrive à une heure du matin chez moi, ayant pris dans ma voiture une jeune femme et son enfant qui était au chemin de fer, sans ressources pour se faire conduire chez elle.

3 octobre. — J’avais déjà pris mon parti de la perte de ma malle ; je ne regrettais que mes croquis de Strasbourg, mais surtout ce même petit livre dans lequel j'écris ; je voyais tout cela dans les mains de quelque Allemand ! La malle revient, et je m’embarque à une heure.

Je trouve Nieuwerkerke, qui monte dans la même