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Page:Delacroix - Journal, t. 3, éd. Flat et Piot, 3e éd.djvu/278

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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

pour cela ceux de leurs disciples qui s’efforcent vainement de se faire leurs égaux. C’est un grand point de venir le premier, on prend le meilleur même sans choisir ; on peut être simple même sans savoir ce que c’est que la simplicité ; on est court parce qu’on n’a besoin ni de remplir, ni de passer la mesure de personne ; on s’arrête à temps parce que nulle émulation n’excite à poursuivre au delà… »

Ne prendrait-on pas souvent l’absence de l’art pour le comble de l’art ? Si l’art dans la suite de son développement n’aboutit qu'à produire des articles toujours moindres, on me pardonnera d’avoir une profonde compassion pour les époques qui ne peuvent se passer du labeur compliqué de l’art.

Je demande qu’on ne soit pas trop dupe d’un grand mot : la simplicité, et qu’on veuille bien ne pas faire de la simplicité la règle du temps où elle n’est plus possible. C’est le thème de tous les pédants d’aujourd’hui. Chenavard ne voit rien après ce qui a été fait. Delaroche se hérissait quand on parlait de l’antique romain ; Phidias avant tout, comme Michel-Ange pour Chenavard ! Cependant ce dernier met Rubens dans sa fameuse heptarchie. Il admire Rubens et écrase avec Rubens les infortunées tentatives des hommes de notre temps. Cependant Rubens a paru dans une époque de décadence relative ; comment le donne-t-on dans ce système pour compagnon à Michel-Ange ? Il a été grand d’une autre manière. Cette simplicité qu’on exalte, dont parle Thierry, tient souvent à des tour-