Aller au contenu

Page:Delacroix - Journal, t. 3, éd. Flat et Piot, 3e éd.djvu/313

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
299
JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

bre ou de Cassel, des ocres, etc. — Chacun de ces verts, de ces bleus relatifs, joue son rôle dans cette gamme atténuée, surtout quand le tableau se trouve placé dans une lumière vive qui, en pénétrant leurs molécules, leur donne tout l'éclat dont elles sont susceptibles ; mais si le tableau est placé dans l’ombre ou en fuyant sous le jour, la terre redevient terre et les tons ne jouent plus, pour ainsi dire. Si surtout on le place à côté d’un tableau coloré comme ceux des Titien et des Rubens, il paraît ce qu’il est effectivement : terreux, morne et sans vie. Tu es terre et tu redeviens terre.

Van Dyck emploie des couleurs plus terreuses que Rubens, l’ocre, le brun rouge, le noir, etc.

Vendredi 20 novembre. — Je compare ces écrivains qui ont des idées, mais qui ne savent pas les ordonner, à ces généraux barbares qui menaient au combat des nuées de Perses ou de Huns combattant au hasard, sans ordre, sans unité d’efforts, et par conséquent sans résultat. Les mauvais écrivains se trouvent aussi bien parmi ceux qui ont des idées que chez ceux qui en sont dépourvus. C’est le sentiment de l’unité et le pouvoir de la réaliser dans son ouvrage qui font le grand écrivain et le grand artiste.

Samedi 5 décembre. — A l’Institut, Gatteaux[1]

  1. Jacques-Édouard Gatteaux (1788-1881), statuaire et graveur en médailles, membre de l’Institut depuis 1843.