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Page:Delacroix - Journal, t. 3, éd. Flat et Piot, 3e éd.djvu/330

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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

10 mars. — La Vue de Dieppe avec l’Homme qui sort de la mer avec les deux chevaux[1].

14 mars. — Les artistes qui cherchent la perfection en tout sont ceux qui ne peuvent l’atteindre en aucune partie.

15 mars. — Je suis souffrant depuis quelques jours de l’estomac ; je l’ai fatigué un peu peut-être, et de plus je travaille beaucoup depuis un mois et demi.

J’ai sous les yeux dans ma chambre la petite répétition du Trajan[2] et le Christ montant au Calvaire. Le premier est blond et clair beaucoup plus que l’autre. Le petit Watteau[3] que j’ai mis à côté de tous les deux a achevé de me démontrer où sont les avantages des fonds clairs. Dans le Christ, les terrains, surtout ceux du fond, se confondent presque avec les parties sombres des personnages : la règle la plus générale est d’avoir toujours des fonds d’une demi-teinte claire, moins que les chairs, bien entendu,

  1. Voir Catalogue Robaut, no 1410.
  2. Il s’agit de l’esquisse de la fameuse toile la Justice de Trajan, peinte en 1840 et qui est l’honneur du musée de Rouen. (Voir Catalogue Robaut, no 693.) « La Justice de Trajan est peut-être comme couleur la plus belle toile de M. Eugène Delacroix, et rarement la peinture a donné aux yeux une fête si brillante : la jambe s’appuyant dans son cothurne de pourpre et d’or au flanc rose de sa monture est le plus frais bouquet de tons qu’on ait jamais cueilli sur une palette, même à Venise. » (Th. Gautier, Les Beaux-Arts en Europe.)
  3. Delacroix tenait de Barroilhet ce petit tableau de Watteau, les Apothicaires. Il l’a légué par testament à M. le baron Schwiter. (Corresp., t. I, p. vi.)