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Page:Delacroix - Journal, t. 3, éd. Flat et Piot, 3e éd.djvu/439

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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

1861

1er janvier. — J’ai commencé cette année en poursuivant mon travail de l'église comme à l’ordinaire ; je n’ai fait de visites que par cartes, qui ne me dérangent point, et j’ai été travailler toute la journée ; heureuse vie ! Compensation céleste de mon isolement prétendu ! Frères, pères, parents de tous les degrés, amis vivant ensemble se querellent et se détestent plus ou moins sans un mot que trompeur.

La peinture me harcèle et me tourmente de mille manières à la vérité, comme la maîtresse la plus exigeante ; depuis quatre mois, je fuis dès le petit jour et je cours à ce travail enchanteur, comme aux pieds de la maîtresse la plus chérie ; ce qui me paraissait de loin facile à surmonter me présente d’horribles et incessantes difficultés ; mais d’où vient que ce combat éternel, au lieu de m’abattre, me relève ; au lieu de me décourager, me console et remplit mes moments, quand je l’ai quitté ? Heureuse compensation de ce que les belles années ont emporté avec elles ; noble emploi des instants de la vieillesse qui m’assiège déjà