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Page:Delacroix - Journal, t. 3, éd. Flat et Piot, 3e éd.djvu/87

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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

complètement ; il y a en nous un écho qui répond à toutes les impressions : ou nous avons vu cela ailleurs, ou bien toutes les combinaisons possibles des choses sont à l’avance dans notre cerveau. En les retrouvant dans ce monde passager, nous ne faisons qu’ouvrir une case de notre cerveau ou de notre âme. Comment expliquer autrement la puissance incroyable de l’imagination et, comme dernière preuve, cette puissance incroyable qui est relativement incomparable dans l’enfance ? Non seulement j’avais autant d’imagination dans l’enfance et dans la jeunesse[1], mais les objets, sans me surprendre davantage, me causaient des impressions plus profondes ou des ravissements incomparables ; où aurais-je pris auparavant toutes ces impressions ?

12 septembre. — Arrivé à Brive à dix heures. François était venu m’y chercher, et reparti.

Je parcours la ville, qui est très jolie ; l'église romane, où on a peint des cannelures et des caissons ; le collège ou séminaire, charmante architecture de la Renaissance.

Je pars à midi et demi et suis à Crose vers trois heures ; je ne puis vaincre, tout le long du voyage, une somnolence extrême. Frappé de la vue de Turenne et de ses ruines. Beaucoup d'émotion en arrivant.

  1. Se reporter dans le second volume à tout ce qu’il dit sur l’Imagination et sur l’Idéalisation. (Voir t. II, p. 126 et 241.)