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Page:Delacroix - Journal, t. 3, éd. Flat et Piot, 3e éd.djvu/94

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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

qui l’environnent, à cause de l’ombre qui résulte de cet arrangement. Mon chasseur de Vincennes me dit que les Anglais sont des soldats de parade qui s’en vont trop tôt, malgré la renommée de leur ténacité. Peut-être, en bons alliés, faisons-nous pour eux, à l'égard de la bravoure, ce qu’on fait pour les avares dont on veut tirer quelque chose en les louant de leur générosité…

J’arrive à Montmoreau ; je suis conduit droit au chemin de fer, où je m’encage vers onze heures et demie.

A Angoulême, rencontre de Mme Duriez[1], de sa fille, de son gendre et de son petit-fils. Je les aide à monter en voiture ; cette rencontre qui était dans les décrets du destin, puisque je m'étais flatté d’aller les voir à Hurtebize, a rajeuni de bons sentiments et de bons souvenirs ; mais j'étais déjà fatigué de tous mes mouvements des jours passés ; le repos, pendant cette route, m’eût été nécessaire ; j’aurais traversé avec plus de plaisir, avec le recueillement nécessaire, ces pays aimés pleins de tristesse et de doux souvenirs ; au lieu de cela, chaleur étouffante, conversation soutenue jusqu’au soir, mille sujets d’une fatigue qui a duré et s’est prolongée à Strasbourg.

Dîner incroyable à Orléans ; véritable pillage dans la salle où tous ces voyageurs pressés s’arrachaient les morceaux et se tiraient les chaises et les plats.

J’arrive à Paris à près de dix heures.

  1. Mme Duriez de Verninac, Dans son testament Delacroix lui a laissé de nombreux souvenirs.