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DISCOURS PRÉLIMINAIRE.

lipse de Képler, et que toutes ses équations du centre fussent en partie empiriques. Il eût le mérite d’appliquer le calcul trigonométrique à la projection de Képler, pour les éclipses sujettes à une parallaxe, et il trouva un théorème qu’on peut qualifier de fondamental pour cette théorie. Ses observations de la Lune, réduites et calculées par La Caille avec des précautions plus scrupuleuses, sont ce que nous connaissons de mieux à cette époque (1683 — 1685). Elles sont les plus anciennes que l’on puisse employer à déterminer l’accélération du mouvement de la Lune. Les travaux astronomiques de Roëmer et de La Hire sont un appendice naturelle de ceux de Picard, et, pour ne pas les en séparer, nous nous sommes un peu écarté de l’ordre chronologique, qui, après Picard, appelait Cassini. Mais il nous a paru que, malgré sa grande et juste célébrité, le premier des Cassini n’eût jamais, en ce qui concerne la véritable Astronomie, ni des idées aussi saines ni des plans aussi bien raisonnés. Au lieu de s’appliquer à perfectionner les instrumens et les observations, il imagina son gnomon de Bologne, qui n’était qu’un pas rétrograde, quoiqu’il ait été loué outre mesure. A son arrivée en France, il témoigna le regret que l’observatoire n’eût pas été construit de manière à former un vaste cadran solaire. Il aurait voulu en faire un instrument de même genre que son gnomon, et seulement un peu plus complet. Il traita l’Astronomie comme les Grecs traitaient la Philosophie ; il la regardait comme une science purement conjecturale, ou celui qui voulait se distinguer et devenir chef de secte devait avoir des opinions à lui. Toute sa vie il persista dans le mauvais système qu’il s’était formé pour les comètes, d’après les idées de Képler et de Tycho. Jamais il n’eut l’air de faire la moindre attention aux découvertes de Newton. Il crut entrevoir que la Terre était un sphéroïde allongé, et ne réussit que trop à accréditer cette opinion, qui est certainement un des dogmes de son école. Il voulut changer l'ellipse de Képler. Par ces idées et quelques autres, il paraîtrait avoir retardé plutôt qu'accéléré les progrès de l’Astronomie ; mais dans quelques autres parties, moins importantes à la vérité, il s’est acquis une gloire plus solide, et il n’a mérité que des éloges. Le premier il a donné une théorie ingénieuse et déjà fort approchée des réfractions ; il détermina fort passablement la parallaxe du Soleil ; il donna les premières tables des satellites de Jupiter ; elles laissaient beaucoup à désirer sans doute, mais celles du premier satellite furent certainement très utiles à la Géographie. Long-temps il en fit mystère, et ne publia que des éphémérides ; ce mystère même fut peut-être une des causes qui le