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Comme tout le monde

Ses épaules, surtout, lui paraissaient jolies. Il était bien rare, maintenant, qu’elle s’examinât ainsi dans la glace. Elle n’était pas encore vieille, mais sa jeunesse était passée. Alors elle avait cessé de porter aucun intérêt à sa personne physique.

Des cheveux blancs ?… Quelques-uns, cachés dans la tignasse fauve. Des rides ?… Une grande entre les deux sourcils, beaucoup de toutes petites sous les yeux. Mais une bouche toujours fraîche, plus éclatante d’être demeurée intacte dans la figure un peu fanée ; des yeux restés candides comme ceux d’un enfant ; et ce petit nez légèrement relevé, qui conservait à tout le visage un air jeunet.

Épaissie, oui, la gorge molle, les hanches importantes…

Tandis que la couturière lui retirait la chemisette, Isabelle soupira. Les bras nus, elle se considéra quelques minutes encore, son buste gras tassé dans un vieux corset, le court jupon moiré laissant voir ses jambes en bas de coton.

Et, comme la couturière retournait en bas où se trouve la machine à coudre, Isabelle s’attarda dans son examen.

Certes, ses épaules étaient encore jolies… Elles avaient vécu jolies tant de longues années dans les corsages d’Isabelle ; et jamais une voix câline