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Comme tout le monde

reste peut-être de toi, mon mort ! Ô fantôme, esprit, m’entends-tu ? Mon repentir répare-t-il ce que je t’ai fait ? Es-tu consolé par ma douleur ? Tel que te voici devenu, peux-tu m’aimer encore ? Peux-tu me plaindre ? Peux-tu me pardonner ?… Hélas ! hélas ! Est-ce que je parle encore à mon fils, ou bien est-ce au néant que je parle ?… »

Isabelle se tord les mains dans le silence et la solitude du cimetière trempé. Les branches des arbres, autour d’elle, s’égouttent dans les flaques. Le froid la fait grelotter ; elle ne s’en aperçoit même pas.

Enfin, la nuit venant, elle se relève, et, s’arrachant à regret de sa désolation, elle sort du cimetière.

Ombre dans l’ombre, elle marche vite. Les maisons se sont refermées. Sous le premier réverbère, qu’on vient d’allumer, une seule silhouette s’agite, une silhouette de femme. Est-ce une mère qui pleure son enfant ? Sort-elle aussi du cimetière ? Isabelle, en la dépassant, lui jette un coup d’œil, la reconnaît. Que fait madame Lautrement dans le quartier du cimetière ? Madame Lautrement n’a pas d’enfants, madame Lautrement ne pleure personne…

Isabelle rentre chez elle. Zozo n’est pas à la maison, Léon non plus n’est pas à l’étude. C’est