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Page:Delarue-Mardrus - L’hermine passant, 1938.djvu/122

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l’hermine passant

armoriée et vermoulue dans laquelle, retenant son rire, elle dut prendre place toute seule en sautant du train.

M. le comte et Mme la comtesse attendent mademoiselle au château…

Habituée aux ruées du cabriolet fraternel, dans lequel on n’a le temps de rien voir, elle se laissait avec étonnement cahoter le long de routes interminables. Des lieues de campagne défilaient au trot dolent du gros cheval gris. Des fermes et encore des fermes passaient. À chaque carrefour paraissait un calvaire qui sentait déjà la Bretagne. Pas une affiche, pas une auto, pas une usine. Ignorance totale du tourisme. L’haleine de Paris ne parvient pas jusqu’à cette terre bâtarde, mitoyenne, qui n’est ni Bretagne, ni Vendée, ni Anjou, ni Normandie ou qui, plutôt, est un peu de tout cela, mais, repliée sur elle-même, gorgée de paysannerie, sentant encore la chouannerie et le hobereau, ne peut intéresser personne, dernier refuge d’une France passée qu’on ne retrouvera plus nulle part que là.

Un lent charme enveloppait la Parisienne, calmait jusqu’au fond d’elle-même