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Page:Delarue-Mardrus - La mère et le fils,1925.djvu/146

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la mère et le fils

I say, monsieur Johny John ! Mon intention n’est pas du tout de vous jouer un sale tour. Je n’ai pas besoin de la loi pour contrôler ma signature. Mais ma vie est extrêmement compliquée, j’aime mieux vous l’apprendre. Et, si vous tenez à moi, il faut que vous consentiez à m’aider. D’abord vous allez me laisser partir pour un petit bout de temps, le moins longtemps possible, rassurez-vous. Ensuite je vous dirai : je ne pars pas seul. J’emmène la petite Marie Lénin.

Une seconde fois, le boy s’exclama :

— Aoh !…

— Je ne peux pas la laisser, monsieur Johny John. Alors c’est à vous de vous arranger (vous comprenez ?) pour que ses parents ne me fassent pas d’ennuis. Il faut qu’ils sachent bien que leur fille est perdue pour eux… Inutile de courir après elle. Eh bien ! je l’épouserai dès que ce sera possible, si vous voulez tout savoir, et, à ce moment-là, je me réconcilierai avec la famille, qui n’aura pas à regretter ce mariage. Est-ce entendu comme ça, monsieur Johny John ? Réfléchissez bien. Et si mes conditions ne vous vont pas, parole de loyal garçon, je vous paierai en plusieurs fois le dédit que vous voudrez… Ah ! pardon… Un mot encore. J’ai besoin, si vous acceptez la première combinaison, de partir avec ma fiancée tranquillement par le train de ce soir. Je compte donc que vous ferez le nécessaire.

La nuit était doucement tombée, et les paysages commençaient à valser entre chien et loup.

Seuls dans leur compartiment de premières, Irénée et Marie étaient assis l’un à côté de l’autre.

Il avait voulu la faire voyager en premières, pour que, tout de suite, sa pauvre vie fût orientée vers le confort, pour qu’elle ne reconnût plus rien qui ressemblât aux mauvais jours passés. Pourtant, il ne lui parlait pas, ne la regardait pas, ne lui prenait pas la main.

Quand la nuit fut tout à fait venue et le train allumé :

— Tu vois ce panier, là, dans le filet ? Je vais te le descendre ! C’est ton dîner. Moi, je n’ai pas faim. Mange. Ne