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Page:Delarue-Mardrus - Le Pain blanc, 1932.djvu/95

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LE PAIN BLANC

— Écoute ! je vais te laisser. Il faut que je m’occupe de la maison. J’ai tant de manies, si tu savais ! Mais je voulais t’exposer mon programme d’aujourd’hui. Si ça ne te plaît pas, tu le diras. Voilà : jusqu’à midi tu feras ce que tu voudras. Tu as peut-être des lettres à écrire, tu peux étudier ton piano… ou tu dormiras… à ton aise. Après déjeuner, nous nous mettons en route toutes les deux, et nous faisons des tas de courses pour toi. Il faut des robes, des chapeaux, et tout le reste. Nous prendrons le thé dans un petit coin à moi, très gentil et très tranquille. Après nous referons des courses, si tu n’es pas trop fatiguée. Et, s’il nous reste du temps avant le dîner, eh bien ! nous ferons de la musique. Ça te va ?…

— Ça me va tout à fait, mère !… Entendu !…

— Bon, mon chéri !

Pas un mot de plus. Un tendre baiser sur le front. La concise Octavie était déjà repartie.

Elle s’était donné ce plaisir inédit : flâner en chemise dans sa chambre. Cela la faisait rire toute seule. Elle s’étonnait de n’être plus du tout triste. Une vive curiosité l’éveillait. Toute cette journée qui commençait serait une série de découvertes. Elle se rendait compte que, Parisienne, elle ne connaissait pas Paris.

« Les grands magasins, je me souviens, c’est bien ennuyeux, mais je n’ai plus dix ans. Peut-être que, maintenant, ça va m’amuser ?… »

Elle alla regarder ses livres, les ouvrit, parcourut des lignes.

— Voyons ! soyons plus raisonnable que ça ! Je vais faire ma toilette, puis j’écrirai à Mlle Levieux.

« Chère mademoiselle… »

Quand les six pages furent remplies, elle plia, cacheta. L’heure de la récréation la tourmentait.