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fort exacte, l’est bien assez pour le train des affaires communes de la vie. »

Smith a donc été forcé de reconnaître, en fait, la loi de l’offre et de la demande comme régulatrice de la valeur : cette conclusion pratique était fatale. Il n’y a pas, en effet, de valeur absolue ; la valeur consiste, suivant la remarquable formule de Bastiat, dans le rapport de deux services échangés, et un rapport est essentiellement relatif. Mais il ne s’ensuit nullement que les fluctuations de la valeur n’aient aucune limite : la loi de l’offre et de la demande est elle-même dominée par une autre loi supérieure qui borne l’étendue de ces variations et les maintient autour d’un point central représentant le travail dépensé pour la production des marchandises. Aussi nous ne pouvons qu’admirer, sans réserve, les pages remarquables où l’auteur a mis cette loi en lumière dans son intéressante étude sur le prix des marchandises.


Le prix est l’expression de la valeur d’une marchandise lorsque la monnaie sert de terme de comparaison Le prix actuel, auquel la marchandise se vend communément est, selon Smith, ce qu’on appelle son prix de marché ; il est déterminé par l’offre et la demande effectives, et, par suite, éminemment variable suivant l’état de la place ; il gravite ainsi autour d’un point central dont il ne peut s’écarter longtemps et qui constitue le prix naturel.

« Lorsque le prix d’une marchandise, dit le célèbre économiste[1], n’est ni plus, ni moins que ce qu’il faut pour payer, suivant leurs taux naturels, et le fermage de la terre, et les salaires du travail, et les profits du capital employé à produire, cette denrée, la préparer et la conduire au marché, alors cette marchandise est vendue ce que l’on peut appeler son prix naturel… Différentes circonstances accidentelles peuvent quelquefois tenir les prix de marché un certain temps élevés, au-dessus du prix naturel, et quelquefois les forcer à descendre un peu au-dessous de ce prix. Mais quels que soient les obstacles, qui les empêchent de se fixer dans ce centre de repos et de permanence, ils ne tendent pas moins constamment vers lui. »

  1. Rich., liv. I, ch. II (t. I, p. 74).