Page:Delatour - Adam Smith sa vie, ses travaux, ses doctrines.djvu/307

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restent intégralement à la charge des plaideurs. Il n’en est autrement que des droits perçus à l’occasion de la vente des terres : ceux-là atteignent le vendeur, souvent forcé de vendre et ne pouvant presque jamais faire la loi à l’acheteur parce que ce dernier est rarement obligé d’acquérir à bref délai ; ils restent donc complètement et définitivement à la charge de ceux qui sont détenteurs des terres au moment de l’établissement de la taxe. Et encore, dans ce cas même, l’incidence est directe lorsqu’il s’agit de maisons nouvellement bâties, car si l’entrepreneur qui fait construire pour revendre perdait son profit, il cesserait de construire, et l’impôt, par la loi de l’offre et de la demande, resterait quand même à la charge de l’acquéreur.

Mais, malgré leur incidence généralement directe, les impôts de cette catégorie ont un grand vice, aux yeux de Smith, en ce qu’ils attaquent le capital et qu’ils font passer dans le revenu de l’État une partie de ce capital des particuliers, diminuant ainsi le fonds consacré à l’entretien du travail productif. De plus, s’ils ont l’avantage d’être certains et à peu près commodes, ils sont essentiellement inégaux, parce que la fréquence des mutations n’est pas toujours la même pour des propriétés d’égale valeur. Enfin, les impôts sur les transmissions à titre onéreux sont particulièrement anti-économiques dès qu’ils cessent d’être très modérés, parce qu’ils entravent la circulation de la propriété, toujours disposée, nous l’avons dit, à passer des mains des inhabiles en celles des plus capables.


En ce qui concerne les salaires, Adam Smith repousse tout impôt qui aurait pour but de les frapper directement et efficacement, car il estime qu’il n’est jamais possible de les atteindre. Selon lui, le taux des salaires est réglé uniquement par l’état de la richesse publique (état de progrès, état stationnaire, état de décadence) ; en conséquence, l’impôt, pas plus qu’aucune autre cause, ne peut altérer ce rapport, et le montant de la taxe ne fait que s’ajouter au taux du salaire, pour un chiffre même bien supérieur. — Nous ne sommes pas de cet avis. Il est hors de doute que l’effet immédiat de l’impôt sera de faire hausser les salaires, mais cette hausse même aura bien vite pour résultat de restreindre la consommation dans une proportion à