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Page:Delavigne - Œuvres complètes, volume 4, Didot, 1881.djvu/109

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Viens recueillir sa dernière parole,
Grande ombre de Napoléon !
C’est à toi de graver son nom
Sur les piliers du nouveau pont d’Arcole.

Ce soleil de juillet qu’enfin nous revoyons,
Il a brillé sur la Bastille,
Oui, le voilà, c’est lui ! La Liberté, sa fille,
Vient de renaître à ses rayons.
Luis pour nous, accomplis l’œuvre de délivrance ;
Avance, mois sauveur, presse ta course, avance :
Il faut trois jours à ces héros.
Abrège au moins pour eux les nuits qui sont sans gloire ;
Avance, ils n’auront de repos
Que dans la tombe ou la victoire.

Nuits lugubres ! tout meurt, lumière et mouvement.
De cette obscurité muette et sépulcrale
Quels bruits inattendus sortent par intervalle ?
Le cliquetis du fer qui heurte pesamment
Des débris entassés la barrière inégale ;
Ces cris se répondant de moment en moment :
Qui vive ? — Citoyens. — Garde à vous, sentinelles !
L’adieu de deux amis, dont un embrassement
Vient de confondre encor les âmes fraternelles ;
Les soupirs d’un blessé qui s’éteint lentement,
Et sous l’arche plaintive un sourd frémissement,
Quand l’onde, en tournoyant, vient refermer la tombe
D’un cadavre qui tombe…

Au Louvre, amis ; voici le jour !
Battez la charge ! au Louvre ! au Louvre !
Balayé par le plomb qui se croise et les couvre,
Chacun, pour mourir à son tour,
Vient remplir le rang qui s’entr’ouvre.
Le bataillon grossit sous ce feu dévorant.