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Page:Delbos - De Kant aux postkantiens, 1940.djvu/30

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qu’à la condition de n’être pas une simple détermination de la pensée, d’être posée hors de la pensée ; l’existence, c’est l’absolue position d’une chose. Thèse qui ne sera jamais plus perdue pour Kant, et qui consistera à prétendre sous des formes plus ou moins diverses que toute existence, — non seulement l’existence en soi, mais l’existence du donné, — est irréductible à la raison conceptuelle.

Mais d’autre part, au même moment, Kant se demande si, par sa forme propre et ses procédés propres d’explication, la raison, telle que l’entendent les wolffiens, est capable d’atteindre son objet. Cette raison est, pour eux, avant tout une raison logique, opérant sous l’empire du principe d’identité ou de contradiction. Or, à supposer que le principe d’identité ou de contradiction gouverne tout, n’est-il pas vrai qu’il est exclusivement formel, qu’il ne détermine rien ? N’apparaît-il pas que les relations réelles sont loin de se modeler sur les relations logiques ? Que l’on considère, par exemple, l’opposition logique, ou la contradiction : entre deux termes contradictoires, logiquement, il faut choisir, ils ne peuvent appartenir ensemble au même sujet ; mais, dans la nature, il y a des oppositions réelles, qui admettent fort bien la coexistence des termes opposés ; ainsi la cause de l’impénétrabilité est une force véritable qui s’oppose réellement à l’attraction ; s’il fallait ramener les relations réelles aux relations logiques, l’impénétrabilité ne serait que la non-attraction, ce qui est insoutenable. Telles sont les observations qui constituent le fond de l’Essai pour introduire dans la Philosophie le concept des quantités négatives (1763), et elles aboutissent à mettre en lumière pour la première