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Page:Delbos - De Kant aux postkantiens, 1940.djvu/96

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déalisme, et il faut y ajouter ceci : L’intelligence agit ; mais elle ne peut agir selon sa propre essence que d’une certaine manière ; si l’on se représente par abstraction cette nécessaire façon d’agir détachée de l’action même, on peut y voir les lois nécessaires de l’intelligence. — Par là aussi s’explique le sentiment de nécessité qui accompagne les représentations déterminées ; ce n’est point au fond une impression venue du dehors que l’intelligence sent là ; mais elle sent dans cet agir les limites de sa propre essence. — En tout cas, c’est le propre de la Wissenschaftslehre que de déduire de l’intelligence le système de ses façons d’agir nécessaires et avec lui en même temps les représentations objectives qui en résultent (I, pp. 440 sq.).

Mais dans l’intelligence même, comme nous avons vu, il y a, à la fois, idéalité et réalité, position d’elle-même par l’action et aperception d’elle-même. Or comment peut s’accomplir cet acte originel par lequel l’intelligence se saisit elle-même, devient objective pour elle-même ? Par une intuition intellectuelle. L’intuition intellectuelle est la conscience immédiate que j’agis et de ce que je fais en agissant. Qu’il y ait une telle intuition intellectuelle, cela ne se laisse pas démontrer par des concepts ; mais chacun peut l’éprouver en soi au moment où il agit. Elle est présente à chaque moment de notre conscience. Quiconque s’attribue une activité se réfère à cette intuition. En elle est la source de la vie, et sans elle est la mort. D’ailleurs, l’intuition intellectuelle n’est pas isolée du reste de la conscience ; si elle s’en laisse abstraire, c’est par un procédé d’analyse philosophique aussi légitime que celui qui abstrait l’intuition sensible, — alors que celle-ci n’est possi-